samedi 5 octobre 2024

Katmandou (in progress)


 

Je suis né à Katmandou, dans le creux d’un chemin

J’ai grandi en France, sous ma peau couleur indien

Mes papiers sont en règle, ma vie tout de même

M’a fait passé en garde à vue des matins blêmes

Parce que dans ma patrie un peu tricolore

Bricolée de tant de conquêtes incolores

Il faut encore savoir montrer patte blanche

Bien blanche la patte pour éviter les planches

Assemblées pour construire des millions de cercueils

Rassemblées pour instruire les enfants dans le deuil

Et monter tout droit des hommes à l’incertain destin

A l’impossible rêve d’aimer leurs prochains

 

Mais à Katmandou j’ai laissé ma mère et ma sœur

J’ai laissé un peu plus que des morceaux de mon cœur

J’ai laissé mes peurs et mes premières amours

Toute ma faim d’aimer l’humanité sans détour

Au cul d’un camion benne qui sent les ordures

Je m’imagine un destin et je construis des murs

Pour ma sœur, pour ma mère et pour tous les futurs

Pour tous les demains qu’on n’a pas eus, ça c’est sûr !

Pour tous les crépuscules qu’il faut vivre à Paris

Avec les parias qui n’ont plus qu’un cœur pour pays

C’était pas l’idée que je m'faisais de la France

Faute croire qu’on choisit pas toujours nos délivrances

 

Ce matin, parait qu’il a neigé sur Katmandou

Moi j’ai le ventre vide et je prie en hindou

J’implore mes ancêtres de tout pardonner

Je supplie les couleurs de ne pas m’abandonner

La misère n’a jamais été faite pour moi

Alors j'm'habille d'un masque de guingois

Au cul d’un camion benne qui est mon armure

Je m’enfuis pour ne plus avoir à longer les murs

Ni pour que ma mère ou ma sœur ne voient les sanglots

D’un gamin de Katmandou parti un peu trop tôt

D’un gamin de Katmandou qui gèle en plein Paris

Sous la tente où il a réfugié ses insomnies

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire