samedi 30 novembre 2024

Stabat Mater


 

Source d’hier elle déploie ses ailes

La sorcière en sabbat de jumelles

Pour tirer dans l’ombre les ficelles

Des amours qu'elle enfourne à la pelle

 

Bouche dégout et jupons en plein air

Faite de rien d’autre qu’un peu d’éther

Malfamée à l’endroit comme à l’envers

La sorcière salit ce qui nous est cher

 

Entre dans l’antre pour t’en repaître

Triste ingénu au regard de prêtre

Vis l’instant en te croyant renaître

Au ciel des putains sans dieu ni maître

 

Tu crèveras comme tous ceux d’antan

Car les sorcières courent sous le vent

Elles dégueulent dans les contre-courants

Juste pour mieux maltraiter les printemps

vendredi 29 novembre 2024

Toussure

 

Les bras tordus dans les échancrures

Des heures de joie et leurs parjures

Je me suis couvert de cent blessures

Quand je croyais mes baisers murmures

 

Mais quelle injure !

 

Faite à mes intimes soudures

D’avoir bien trop aimé les armures

Les hivers sans baisers ni coutures

Lisses à crever dans leurs conjectures

 

Quelques ratures

 

A givrer vite dans les bordures

A cacher derrière les tentures

Ou à jeter sur un tas d’ordures

Pour s’échapper de la pourriture

 

Et parler aux murs

 

Fermer les yeux sur leur vraie nature

Ourlée de colère et d’inculture

Vulgaires à donner cul en pâture

Médiocres dans toutes leurs allures

 

Dans la mâture

 

Juste avant de carguer la voilure

De l’écoute jusqu’au point d’amure

Pour fuir les dernières impostures

J’écris le mot « fin » dans un murmure

vendredi 22 novembre 2024

Voie sans issue

 

Elle était si abîmée qu’elle ne savait même plus comment réagir lorsque quelqu’un lui donnait enfin l’amour dont elle avait besoin pour guérir.

Je l’ai pourtant aimée au premier regard, sans même m’en apercevoir, sans même que j’ai cette conscience aigüe de l’attractivité qui fait flamboyer les cœurs. C’était comme une évidence, comme un coup de tonnerre dans le placard, faisant voler les portes en éclats.

Et je me souviens. Mes pas dans la neige, l’ombre bleuté des épicéas qui voilait le ciel et ma carcasse encombrée d’un soleil nouveau, inconnu, incongru ; incapable de penser à autre chose qu’à une fossette au creux de laquelle je plongeais de toute mon âme en sachant d’avance que je m’y perdrais.

Je me souviens encore, comme si c’était hier de la timidité, de l’effroi puis de l’effusion. De la fusion aussi. Dieu, la rivière et les rivages où nous nous sommes amarrés sont témoins de toutes les vibrations et des arpèges improbables sur lesquels on tentait de s’accorder.

Qui de l’un ou de l’autre a commis les fausses notes ? Nul ne le saura jamais. J’avais mes démons. Elle combattait aussi les siens. Nous vivions à moitié, de part et d’autre d’un mur de verre où cent miroirs transformaient les reflets de l'autre en mirages.

 Mais je l’aimais.

Je le faisais avec maladresse mais c’est parce que je l’aimais. On est toujours maladroit avec les gens qu’on aime. On les écrase, on les encombre avec notre amour… On ne sait pas y faire.