mercredi 29 janvier 2025

Nankurunaisa


 

S.,

« Nankurunaisa » est l’un des mots les plus beaux du monde de mon point de vue. En japonais, il signifie « avec le temps, tout se règle ». C’est drôle comme je trouve que ce mot nous va bien à tous les deux et je t’imagine aisément le poser au centre d’une toile pour y faire jaillir tout autour, ton talent, ta sensibilité artistique, les reflets moirés de tes regards sur le monde…

Avec le temps tout se règle et même les vers que je couche au hasard de mes errances poétiques s’imprègnent de ce baume à l’âme. Je me suis éloigné des précipices et je cueille désormais mes mots au cœur des plaines, au bord d’une rivière chantante, sous un arbre…

Avec le temps, tout se règle. Il m’en a fallu pour faire la paix avec moi-même et sans doute trouveras-tu ces mots étranges, tardifs ou mal à propos. Qui suis-je en effet pour te les écrire ? Je suis l’un de ceux qui un jour, a croisé tes regards et y a vu l’univers tout entier. Je suis une infime partie de toi car d’un seul baiser, tu as semé une graine minuscule en moi. Et malgré la noirceur, malgré le givre qui m’enserrait le cœur, elle a germé, doucement, silencieusement.

Avec le temps tout se règle. Il me fallait auparavant aller au bout du chemin, affronter les pentes et les cailloux, la chaleur et la soif, le désespoir et l’épuisement. Il me fallait affronter seul cette épreuve pour entrevoir dans la pierre, non pas un obstacle mais une nouvelle fondation. Et pendant tout ce temps, tu étais là, dans mes pensées, dans l’ombre ou dans la lumière. Tu étais là à chaque instant et tu n’imagineras jamais la force que tu m’as donné. J’en suis même presque honteux car je sais les épreuves que tu as traversées, peut-être encore plus seule que moi…

Avec le temps, tout se règle. Et je n’oublie jamais les élans qui nous ont poussé l’un vers l’autre. A l’époque tu étais plus solide que moi, malgré tout ce que tu pourrais croire. Je ne voulais pas t’embarquer dans une relation qui t’aurait fragilisée, tant ta reconstruction était source d’inspiration pour moi.

Avec le temps tout se règle. Et j’ai conservé intact le parfum de ta peau, les notes florales d’un parfum de femme enfant, deux fossettes au coin de tes joues qui donnent envie d’y croquer à pleine bouche, le petit pli au coin de tes paupières quand tu ris, la danse de tes doigts quand tu parles. J’ai tout observé tu sais… Et j’ai lu dans ton cœur ce simple mot : « Nankurunaisa » !

samedi 25 janvier 2025

Soleil

 

Je n'ai jamais imaginé qu'on pût être à ce point hanté par une voix, par un cou, par des épaules, par des mains.

Ce que je veux dire, c'est qu'elle avait des yeux où il faisait si bon vivre que je n'ai jamais su où aller depuis.

mardi 21 janvier 2025

Rouge

 

Rouge des roses de pleine ivresse

Ces bouches de soie qui murmurent

Rouge passion coquelicot

Incendie de l'ultime étreinte

Exaltation qui nous consume

En rouge sang jusqu'à l'intime

Rouge pulsant corps à cœur

De mystères et de pigments 

Rouge saison du flamboyant

Aux crépuscules en chute libre

Rouges mes lèvres qui impriment

A l’échancrure des prémices

Le sceau poison de l'indicible

dimanche 19 janvier 2025

Cuando


 

Qu’en est-il du jour, de la nuit

Quand se délitent tous les mots ?

 

Qu’en est-il du bleu aboli

Quand se dispersent ses lambeaux ?

 

Qu’en est-il de chaque silence

Quand mes yeux pleurent les non-sens ?

 

Qu’en est-il du rêve, du sursis

Quand le temps s’épuise sans bruit ?

 

Quand est-il donc de l’insomnie

Quand s’égoutte la surdité ?

 

Quand est-il de l’absurdité

Quand déraisonne la menace ?

 

Qu’en est-il de l’aube si lasse

Quand s’effraient les crimes bannis ?

 

Qu’en est-il de l’infinitude

Quand s’immolent les certitudes ?

 

Quand est-il des cœurs dans nos mains

Quand le sang s’est tari en vain ?

 

Qu’en est-il des matins d’absence

Quand surgit mon indifférence ?